Les bruits qui font peur.
Thomas Jeunesse a lancé une collection intéressante qui se décline en comptes et comptines à écouter.
Bon.
A ce propos, je m'insurge contre le deuxième vocable qui devrait s'écrire avec un "n". En effet, "comptine" a une connotation capitaliste particulièrement déplaisante.
"Contine" devrait être un diminutif de "conte", et "comptine" un diminutif de "compte épargne logement". Ainsi, irait-on voir son banquier avec de maigres économies, en réclamant l'ouverture d'une "contine". Avec les intérêts, on gagnerait un sachet de bonbons à la fin de l'année.
Je m'égare.
Thomas Jeunesse fait tout ce qu'il faut pour rendre les enfants moins cons.
Même s'il n'innove pas en matière de récits : parce que La princesse aux petits pois, Les trois petits cochons, La petite poule rousse, excusez-moi, mais c'est de la redif'.
Les livres sonores sont plus intéressants. Ainsi, Mes bruits de la mer, version bigoudenne, nous fait revivre le naufrage de l'Amoco Cadiz. Dans ce cas, on peut vraiment parler de compte, avec des embruns à 5%, les oiseaux mazoutés, les pelles qui s'activent, les assurances qui s'affolent. Le tourbillon sonore est très réussi : une mère n'y retrouverait pas ses petits !
Sur le même registre, mais en moins tâche, l'éditeur a sorti Les bruits qui font peur. Il ne s'agit pas de la voix claironnante d'un huissier ou d'une chanson de Lara Fabian. Mais c'est tout comme : on a envie de se cacher sous le lit.
Il y a d'abord la sempiternelle sorcière, l'éternelle mal-aimée des contes, qui survole un château en poussant des cris d'orfraie.
Il y a ensuite Loulou le Loup, qui hurle dans la nuit pour appeler ses amis, alors qu'un SMS suffirait.
Puis vient Noémie la chauve-souris, parée d'une robe et d'un collier de perles. Le narrateur nous indique qu'elle s'apprête à faire la fête. Le reste de la famille a déjà la tête à l'envers, alors qu'on n'en est qu'à l'apéro.
Last but not least, Côme le train fantôme et Titou le hibou. Le premier fend l'air, le deuxième fend le coeur. A propos de Titou, le narrateur nous indique : "Il hulule à tue-tête pour chasser les p'tites bêtes". Solitaire et halluciné, le volatile nocturne fait peine à voir.
Mon père m'a offert l'ouvrage pour Noël et je dois dire que je n'avais pas lu une histoire aussi angoissante depuis belle lurette.